Murder (Meurtre)
Film anglais d'Alfred Hitchcock
Genre: Policier
Année: 1930 "L'expression sordide"
Un acteur est choisi comme membre d'un jury au cours du procés d'une jeune femme accusée d'avoir assassiné une amie. Convaincu de l'innocence de la jeune femme, l'acteur décide de prouver son innocence en recherchant le véritable assassin...
Introduction:
Il y'avait plus simple, pour parler d'Hitchcock, mais pour son troisième film parlant, l'immense talent du maître, se faisait déjà ressentir, et pour moi, le tour de force accompli dans cet excellent "Meurtre" suffit déjà à le respecter.
Ainsi, je vais vous embarquer, dans le début d'une longue carrière, un film à l'aurore du parlant, qui marquera toute une carrière, et les fans de cinéma que nous sommes...
Le début du début...
Dès le départ, lorsque le film démarre, on voit à l'écran le staff technique, le nom d'Hitchcock apparaît, l'air de rien, et se dévoile à l'Angleterre toute entière.
Hitchcock s'amusait à dire que son film n'était pas un suspense, mais un Whodunit, un film à énigmes multiples, comme une sorte d'immense cluedo, dans lequel, on ne connait pas l'assassin, faisant ainsi penser à une sorte de puzzle, ou une grille de mots croisés.
Pourtant, le film en prends une toute autre allure, dès le départ, par un système de narration bien particulier.
Tout d'abord, Hitch, s'élance dans la virtuosité, par une mise en scène remarquable, une caméra qui balaye l'espace avec une réelle maîtrise. Un plan fabuleux, dans une cuisine, me rappelle en tout cas, l'immense qualité de ce metteur en scène, même à ses débuts. La caméra se trouve dans une petite kitchinette équipée, puis, au grès des mouvements des deux personnages féminins présents dans la pièce, se déplace, en travelling latéral, d'une pièce à une autre.
Le plan dure quelques minutes, et l'on est comme bercé, par ses mouvements réguliers.
Ensuite, c'est dans la construction filmique, qu'Hitch révèle son talent, par une utilisation constante d'éléments avant-gardistes, novateurs.
Il faut préciser donc que ce film est une transition entre l'ère du muet, et l'avenement du parlant. Il n'existait pas de postsynchronisation, permettant d'enregistrer deux sources sonores différentes. Hitch, allait mettre au point un système D fabuleux, complètement révolutionnaire...
La révolution Hitchcock...
Ce système ingénieux, on le remarque lors de la fameuse scène du monologue de Menier, il est chez lui et se reproche de n'avoir pas pu aider convenablement Diana, il se trouve devant son miroir, et parle dans sa tête.
Les deux sources sonores, n'existant pas, Hitch, décide d'enregistrer la voix de l'acteur à l'avance, puis de la passer sur un magnétophone, avec un fond musical, pendant que l'acteur joue son monologue, on le voit ainsi jouer sur ses émotions, en même temps que sa voix les invoquent, remarquable...
Mais le stratagème du cinéaste ne s'arrête pas là, il passe habilement du policier au huis clos, pour finir en apothèose, dans un casse tête sans demi-mesure.
Du début impressionnant de son métrage, au dénouement fabuleux qu'il déploie, le métrage d'Hitchcok, est un bonheur constant.
Il faut savoir, que les producteurs voulaient que ce soit un film muet, ce qui explique la grande force narrative qui s'en dégage, dans la mesure ou le film est sortit dans sa version muette, puis plus tard, dans une version parlante, absolument sublime...
L'art de L'expression...
"Murder" est une fresque grandiose sur la perdition, sur le remord, notamment en plein milieu du film, lorsque les jurés se regroupent pour appliquer la sentence de Gloria.
On remarque d'une part, que les avis divergent, mais, que tout le monde se laisse perturber et influe,cer par son voisin. Une sorte de partie de tennis, d'arguments et de contre arguments, tous plus ridicules et inexplicables, les uns les autres.
Cette partie du film, en huis clos, révèle la force de narration d'un Hitchcock plus qu'inspiré, il bascule sa caméra, et s'amuse à passer de visages en visages, en tournant dans l'ensemble de la pièce, on y décèle alors les blancs, les moments sans paroles, ou l'on sent que la décision de condamner quelqu'un à mort, pèse lourdement sur la conscience.
Puis, lorsque la sentence tombe, une image d'une beauté cruelle vient alors à l'écran.
Ce plan fixe, sur le mur blanc, qui montre une ombre de guillotine, qui monte, et qui descend, qui monte, et qui descend...symbolisant le temps qui passe, et la mort prochaine.
Murder, vous l'aurez compris, est un tableau sordide et sans concession, de l'innocence, du jugement et de l'erreur judiciaire.
Mais par sa mise en scène révolutionnaire, la réflexion va bien au delà, en s'inspirant du cinéma expressionniste allemand, dans lequel le jeu des ombres, la puissance narrative et les symboles constants, sont capitaux.
Conclusion:
Pour tout fan du maître, il est impossible de passer à côté de l'oeuvre qui a peut être tout déclenché.
On y sent à la fois de la fragilité, et de l'innocence, mais caché par une maîtrise remarquable de la narration et de l'espace.
Même dans des espaces réduits, en parlant de l'univers du théâtre, Hitch a imposé son point de vue, et sa façon de faire.
Rarement l'univers théâtral aura été si bien décrit...Un grand film, pour peu que l'on s'y interesse un minimum...