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25 juillet 2006

Vagues Invisibles (Invisible Waves)

THAILANDEFilm thaïlandais de Pen-Ek Ratanaruang
Genre: Polar
Année: 2006                                          
"Le vent du large..."

Vagues_InvisiblesSynopsis:

Macau. Un jeune chef d’entreprise débordé, Kyoji, est contraint d’assassiner l’amour de sa vie, Seiko. Il s’exécute et se retrouve submergé par la culpabilité. Pour fuir ses tourments et éviter une probable arrestation, il quitte la ville et traverse la Thaïlande. Mais l’éloignement n’empêche pas les tourments qui ne le quittent pas. Au cours de son voyage, il se lie d’amitié avec une séduisante jeune femme, Noi, mais petit à petit, Kyoji perçoit en elle un comportement étrange, et très vite il perd confiance...

Introduction:

Je l'attendais ce nouveau film du réalisateur de "Monrak Transistor" et "Last Life in the Universe".
Deux oeuvres de qualité incontestable, dans deux registres bien différents.
Mais ce fut surtout le second, qui laissait une impression de chef-d'oeuvre. Un film maîtrisé, à l'esthétique remarquable.
Ici, les ingrédients semblent une nouvelle fois réunis, sous forme de récit cyclique, dans lequel chaque objet est à sa place, dans une mise en scène d'une immense sobriété, alternant rigidité des corps, et douceur d'un cadrage minimaliste, mais Ô combien formel...
Au bord de l'autisme, Tadanobu Asano offre l'un de ses plus beaux rôles, et fait de ce film, un chef-d'oeuvre à la limite de la perfection, explications....

Descente aux enfers...Vagues_invisibles_3

Le ton est donné dans les premiers instants, plan fixe, corps rigide et sans mouvement, Kyoji semble errant, avant même de n'avoir commis le moindre geste.
L'opacité de la scène, sa transparence visuelle, transcende l'image, les couleurs sont froides, mais belles, grâce au travail du meilleur chef opérateur actuel, je pense, Christopher Doyle, que l'on connaît chez Wong Kar-Wai, ou prochainement au cinéma dans le nouveau film de Shyamalan (mon dieu quel joie.........)
Une impression de noirceur, qui isole l'action, dans son stricte cadrage.
On imagine assez mal le monde qui entoure Kyoji, parce qu'il est comme prisonnier par le cadre du cinéaste, renfermant des objets, des tableaux, par une mise en scène décomposée.
Une réalisation qui marque une rupture dans les mouvements, préférant le cadrage fixe, pour photographier une démarche, un pas, un geste.
Cette facilité dans le désaxement, presque hors champs, offre une possibilité de lecture inédite chez Ratanaruang, car le formalisme de ce "Vagues Invisibles" ne ressemble en rien à la structure de ses précédentes oeuvres.
Bien que "Last Life..." emprunte quelques idées à ce "Vagues Invisibles", à moins que ce ne soit l'inverse...Sans doute...

Vagues_invisibles_5jpgAu bord de la nevrose...

Une fois l'acte commis, Kyoji n'est plus que l'ombre de lui même, tiraillé entre doute et remords.
Les personnages qu'il va croiser sur son chemin, sans autant que lui, des fantômes d'une vie passée. Refuge des laissés pour compte, ils se retrouvent sur un bateau de croisière, en direction de Phuket, en Thaïlande.
Et ce qui ne devait, dans un film standard par exemple, ne durer qu'une fraction de seconde, dure ici une eternité, comme les vagues inlassables, qui se frottent à la coque d navire.
La séquence du bateau est longue, comme un chemin de traverse, comme le parcours d'un assassin qui cherche sa rédemption.
Kyoji découvre le voyage, la solitude, la mort...?
De ses longues enjambées, à travers les étroits et interminables couloirs du bateau, il découvre le calme, de manière frontale, radicale.
Un radicalisme, allié à un sens de l'épure chez Ratanaruang, qui plonge le spectateur, à coup de sonorités anodines, bruits de coque rouillée, ou mouettes criant au large, une frustration certaine.
Frustration dans le bon sens du terme. Ce désespoir de ne rien connaître, de constater la déchéance morale d'un homme qui a sacrifié son existence pour de l'argent, pour une mission d'une dimension qui dépasse la simple cohérence humaine.
Kyoji, se lave de ses pêchés, en cherchant ailleurs, la même solitude qu'au plus profond de son âme...

Le début de la fin...Vagues_invisibles_1

L'arrivée à Phuket se fait dans la paranoia la plus totale, persuadé (à raison) d'être poursuivi, Kyoji passe son temps à se cacher, dans des endroits ou l'affluence n'existe pas.
Des ruelles sordides, un hôtel poussiéreux, une piscine fermée par des sapins et des arbres.
Une façon de fuir le quotidien, de fuir le monde. Monde auquel il n'appartient plus, depuis longtemps déjà.
Ratanaruang, à travers son récit évoque le destin de ses personnages.
Cette même inexistence au sein d'un monde, cette même apparence fantômatique, ce même passé qu'ils cherchent à fuir, et au final, une trajectoire similaire.
Kyoji, on le sait depuis le tout début, veut mourir.
Son voyage n'est que prétexte à effacer son apparence physique, gommer son existence, son identité.
Mais sa moralité, elle, restera intacte, tant qu'il ne se sera pas supprimé.
Toute la morale du film réside dans cette réflexion. L'homme peut-il tout oublier ?
Vraisemblablement, le cinéaste cherche à confondre physique et psychisme.
L'ambiance de son film le prouve, le cinéaste cherche à travailler l'amplitude d'un espace sonore, créant des sonorités à partir de mouvements, discordants et timides.
Ou encore, la désorientation provoquée par le montage, perturbant toute notion de temps et de lieu précis.
Comme dans "Last Life" le décor avance, et les personnages reculent...

Conclusion:

Le cinéma de Pen-Ek Ratanaruang, c'est confronter l'homme à ses propres peurs. C'est effacer la notion de sentiments, au profit d'un regard glacial et distant sur une situation, mais c'est aussi, beaucoup d'humour dans des moments d'une grande noirceur.
Le cinéaste thaïlandais prouve avec ce film, toute sa dimension artistique.
Entre polar et drame mélancolique, "Vagues invisibles" est ce vent du large, que l'on ne parvient jamais à dompter. Cette vague qui jamais ne s'arrête de se former, prête à tout engloutir sur son passage.
Le plus beau film de cette année, parce qu'il ne se vante de rien, il se forme telle la nature, évoquant un doux parfum de mélancolie chez le spectateur.
Plongé entre onirisme et surréalisme, on ne peut que se laisser emporter par la vague...

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Commentaires
M
Bah l'est pas numéro 1 de l'année pour rien loooooooool
C
"au profit d'un regard glacial et distant sur une situation, mais c'est aussi, beaucoup d'humour dans des moments d'une grande noirceur".<br /> <br /> Hé hé hé !!! Ca ne te fait pas penser à un certains Stanley ça ? loool
T
Faut que je vois absolument alors !<br /> <br /> "Un chef d'oeuvre à la limite de la perfection"<br /> -A te lire, on dirait que ça atteint justement la perfection !<br /> <br /> Ca sent la douceur et le vent de la mer, j'le louperai pas celui-là :-)
E
"Je ne dirai pas qu'il s'agit d'un réconfort, mais presque... :)"<br /> <br /> <br /> Un réconfort ?? Tu nous précise et détaille exactement ce qu'on loupe lol !!<br /> <br /> Non bien sur j'ai compris ce que tu voulais dire t'en fais pas et je suis d'accord avec toi !<br /> Pour le dvd , il y a d'abord Lady Vengeance a acheté car toujours pas vu !
M
Merci du fond du coeur, et je suis vraiment déoslé qu'il ne passe pas par chez toi...<br /> Vraiment ça me tue parce que ces films là sont pour moi les meilleurs, et peu de gens peuvent les voir.<br /> C'est vraiment injuste, et c'est pourquoi je les poste sur ce blog.<br /> <br /> Je ne dirai pas qu'il s'agit d'un réconfort, mais presque... :)<br /> <br /> Merci en tout cas, et j'espère que tu auras la chance de le voir...<br /> Au moins en DVD, il le mérite tellement..
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