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5 juin 2006

La Pègre

coree_du_sudFilm sud-coréen d'Im Kwon-Taek
Genre: Drame
Année: 2003                      
"Corruption dans un monde de brutes..."

la_p_greSynopsis:

Pour survivre dans la société violente et chaotique qui l'entoure, Choi Tae-woong n'a pas hésité à choisir la voie du crime. Dans cet univers, tout repose sur le rapport de force entre les gangs et les étranges liens qu'ils entretiennent avec le pouvoir en place...
Avec l'arrivée d'un nouveau régime décidé à réprimer les activités illicites, Tae-woong change de camp et tente de rentrer dans le droit chemin. Mais il se retrouve dans un monde tout aussi impitoyable et corrompu...

Introduction:

99 ème long métrage, un chiffre improbable mais pourtant réel, symbole d'une carrière impressionante, celle du plus grand metteur en scène coréen encore en vie, Mr Im Kwon-Taek.
Pour ce pré-100 ème film, une virtuosité sans égal à été employée par le cinéaste, qui nous offre une mise en scène élégante, parfaitement orchestrée, faite de longs plans, ou de plans séquences, dévoilant la maîtrise en retenue, d'un grand metteur en scène.
Un cadrage furtif, des mouvements sinueux de l'appareil, autant d'éléments qu'Im Kwon-Taek s'emploit à utiliser pour attirer le spectateur dans son monde, celui de la Pègre...

Force et virulence, maîtrise et perfection...la_p_gre1

Dès le début, le cinéaste imprègne son récit de cette force quasi surhumaine.
Il s'en dégage une forme d'illusionnisme, quelque chose d'improbable, une sensation de souffle, au travers d'un cadrage furtif, qui, à coups d'ellipses temporelles, disparaît, puis réapparaît, plus fort encore.
Cette mise en scène, accompagne un récit destructuré, une sorte d'éclat.
Un film qui confond admirablement bien les époques, les séquences, afin de mieux concentrer le spectateur sur l'action.
Une esbrouffe, un instant eternel, immortalisé sur pellicule.
Le 99 ème film d'Im Kwon Taek situe son histoire dans la Corée du Sud des années 50 à 70.
Pile entre les bouleversements politiques et le début de la corruption.
Le cinéaste tisse un portrait d'un pays ravagé par la Pègre, la mafia nationale, conduite par des individus, pour qui, il n'existe aucun scrupule.
Ces 20 années de ravage politique ou social, entraînent un récit bien ciblé, qui n'entre jamais dans la fresque historique, reconstituée pour le plaisir des yeux.
A contrario, le cinéaste préfère le minimalisme de ce morceau d'histoire, préférant raconter l'intérieur d'un système mafieux, plutôt que les conséquences du régime politique sur un pays tout entier.
Du coup, le film évite le parti pris, ou l'élan politique, devenu récurrent au festival de Cannes par exemple (....:-( .....)
Im Kwon-Taek raconte, toujours avec ce recul, cette distance sur le sujet, qui laisse un sentiment étrange d'étouffement. On est comme pris à la gorge par la force destructrice de son propos.

la_p_gre2Pudeur ou affirmation, l'histoire d'une longue descente...

Choi Tae-woong représente un peu l'homme quotidien, une boule de violence, recroquevillée sur elle même, mais prête à exploser à tout moment.
Du coup, le film tire sa force de cette imprévisibilité.
On est maintenu irrémédiablement dans une forme de suspense.
Comme tiraillé par une force surnaturelle. Une force qui nous tire d'un côté vers l'abstrait, et à la fois, vers le concret.
Deux formes radicalement opposées, pourtant associées avec brio dans cette oeuvre.
Puisque le cinéaste bascule du gangstérisme à la corruption, avec une aisance rare, on sent que le récit peut basculer n'importe quand, n'importe ou...
Il va survoler le monde du cinéma, cachant peut être une réalité non définie, non avouée.
Un cinéma corrompu, mené par des hommes de main, de la Pègre locale.
Le basculement est soudain, comme une sonnette d'alarme.
D'un coup, pas plus, le héro est attiré par la production cinématographique, à cette époque, controversée à tout bout de champ et censurée dès qu'elle aborde la politique du pays ou l'anti-américanisme.
Pourtant, il se lance dans le propos, aveuglé par le goût de l'argent.
Rapidement, la désillusion se fera grande, mais n'empêche pas de constater à quel point la société de l'époque, en asie, fut érigée par des dictatures, pur produit des moeurs...

Vitalité, introspection, le génie se déploit...la_p_gre3

Puis la fin du film est impressionante. Une vitalité exceptionnelle, une richesse scénaristique étourdissante.
Le maître semble plus en forme que jamais, et sait l'utiliser à bon escient.
Par cette abstraction de toute forme de récit vaporeux, de reconstruction simple et sans saveur de l'histoire, le cinéaste signe un nouveau chef d'oeuvre.
Parce qu'il sait manier l'outil filmique avec une pureté exceptionnelle. Filmant introspectivement, l'errance puis la brutalité de son personnage, relevant davantage de l'anti-héro, que du mythe emblématique d'un pays.
Un voyage au coeur du système mafieux, dicté par un code d'honneur inexistant, inventé de toute pièce par chacun des protagonistes.
Dans le film, c'est un constat flagrant que de voir à quel point les personnages sont touchés par un mal permanent, une sorte de virus contagieux.
Il n'épargne personne, mais il n'y a ni bons ni mauvais, finalement.
Que des personnes plus tout à fait saines d'esprit, manipulées par une entité plus puissante, inexistante, ou simplement invisible.
Et si cette entité n'était pas justement la société elle même???

Conclusion:

Ni manichéisme, ni forme quelle qu'elle soit de prise de parti. Distanciation et introspection, dessin abstrait puis concret, l'art d'un mouvement et son contraire semble être la clé de ce nouveau chef d'oeuvre du maître sud-coréen Im Kwon Taek.
A l'aube d'un centième et ultime long métrage, le cinéaste ne cache pas son désir de finir en beauté.
Par ce film, en tout cas, il montre sa capacité à signer, parmis une filmographie complète mais instable, de très grandes oeuvres, se démarquant du cinéma de genre traditionnel.
Presque cent films, mais une vitalité encore stupéfiante, puis surtout, cette expérience du cadrage, cette facilité à montrer les choses, sans les montrer. Cette facilité à esquisser une silhouette, puis l'effacer aussi subitement.
Une très grande oeuvre, à découvrir d'urgence, tant elle est passée inaperçue en France, probablement en raison de son échec au box office coréen...Notamment...

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Commentaires
T
J'ai eu certains echos très positifs. De toute façon, je suis presque tjrs preneur quand c'est asiatique. Je connais le réalisateur mais vu aucun de ses films. Là aussi, un film que je n'ai pas vu mais j'en crève d'envie.
E
J'étais à deux doigts de l'acheter il y a quelque jours , puis je l'ai reposé ! a tort apparemment !<br /> Vu ta critique , je vais vite reparé cette erreur et il rejoindra vite les autres !
C
Cette remarquable argumentation me donne bien sûr envie de me plonger de toute urgence sur cette oeuvre. Je marque en rouge souligné de mettre ce film dans mon prochain panier d'achat !!!!!!!!!!!!!<br /> <br /> Merci cousin de nous ouvrir en permanence à cette boîte magique du septième art niakwè ! :-) Je t'en serai éternellement reconnaissant :-))))
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