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1 janvier 2006

Focus n°2: Au coeur d'un film...

Titre: "In The Mood For Love"in_the_mood_for_love1

Pays: Hong-Kong

Année: 2001

Réalisation: Wong Kar-Wai

Interprétation: Tony Leung, Maggie Cheung

Genre: Comédie dramatique

Introduction:

Deuxième analyse, deuxième film asiatique, même pays, mais autre genre de cinéma. Je vais tenter de décortiquer cette oeuvre majeure du cinéma, dans une analyse personnelle. Chacun perçoit un film à sa façon, et Wong Kar Wai est un cinéaste suffisament complexe pour permettre à chacun de voir chacune de ses oeuvres, différemment.
Aujourd'hui, j'ai choisi "In the Mood for Love" ou l'amour contemplatif, incompris, de deux être déchirés d'un côté comme de l'autre, par leur vie de couple.
Un film qui se ressent, plus qu'il ne se contente d'être regarder, un film sur la vie, minimaliste comme une sonate, simple comme un bonjour. Un chef d'oeuvre, exemple de la maitrise de l'asie sur le monde cinématographique actuel.

La caméra, l'observation du spectateur:

pdvd_0025

Le film commence par cette impression d'observation, la caméra, semble loin de l'action, impression qui se confirmera par la suite, comme en témoignent les photos qui suivent. Le cinéaste place volontairement son cadre, en dehors de l'action, comme pour prendre le rôle du spectateur, qui "observe" sans voir, ou sans être impliquer réellement dans l'action.
En réalité, la caméra, évoque alors un regard extérieur, une sorte de distance volontaire imposée pour le cinéaste, pour signifier une certaine pudeur, et instaurer ainsi, une barrière entre les personnages et les lieux.
D'un côté, les personnages, ensemble, de l'autre, le décor vide et neutre, uni, sans relief et sans âme. Comme en témoigne la photo ci-contre, ou le téléphone contraste avec le bord gauche de l'écran.

La mise en lumière des personnages se fait timidement, ils sont souvent de dos, ou de profil, ou cachés par des pdvd_003éléments
du décor. Sur la deuxième photo, le personnage est même coupé quasi intégralement par un poteau en bois, placé en plein centre du cadre. Ce plan coupe le cadre en son axe, pour renforcer l'impression d'observation. Comme si un oeil, jettait un regard timide et discret vers un hublot.
Si la caméra balaye peu après, de gauche à droite, le décor, elle ne montre jamais le visage de la personne concernée.
Encore une fois on ne situe pas l'action, il s'agit probablement d'un bureau, ou une bibliothèque, mais aucun indice, visuel, du moins, ne laisse l'envisager concrétement.
Sur la photo qui suit, Tony Leung, de profil, est victime lui aussi de cette même observation.
Il est avec quelqu'un dans la pièce, mais on ne voit à nouveau pas cette personne, cela se passe pourtant au même endroit, mais à un moment différent.

Le pilier en bois, à nouveau, marque la séparation entre le pdvd_006
bord droit et gauche de l'écran. Cette fois çi, c'est l'inverse qui se produit, on ne voit pas ce qui se trouve à droite, car le jour est différent, ainsi que la situation du personnage.
L'éclairage est particulier, Tony Leung est éclairé plein cadre, on semble vouloir le mettre en avant dans cette scène, comme pour signifier que l'action est centrée sur lui.
Enfin, la dernière photo, montre Maggie Cheung et Tony Leung, marchant côte à côte vers le haut de l'écran.
Ils sont vu de dos, une nouvelle fois, et la caméra, affaissée au niveau de la voiture, qui jonche le bord gauche de l'écran, symbolise une fois l'impression d'observation.
Quelqu'un, qui n'est autre que le spectateur lui même, semble vouloir s'infiltrer à travers la romance naissante des deux êtres.

comme une sorte de perversion, on observe, avec recuul et distance, un flirt sincère, chargé en émotion.
La ville paraît déserte, pas un passant, un autre taxi garépdvd_023
au loin là-bas, peut être la même histoire, une rue plus loin, cachée par un mur.
Toujours chez Kar-Wai, sur ce plan, sa fascination pour la symbolique des extremes.
Toujours ce jeu du droite-gauche, quasi alterné, qui renvoit systématiquement aux sentiments et émotions des personnages.
La gauche, pour un personnage, la droite, pour l'autre, et cela altèrne selon les états d'esprit.
Pas un mot ne se prononce, ils avancent vers le fond du cadre, avec cette nonchalance et indifférence totale.
Wong Kar Wai, s'emploie à montrer une galerie de personnages, jonglant avec leur sentiments, avec maladresse et instabilité, comme en témoigne ce jeu de yo-yo, entre les deux bords du cadre. La caméra, toujours en observation, qui reste là, fixe, afin de capter le mouvement et amener ainsi, la curiosité des spectateurs.

La mise en scène, ou l'impression du cadre fragmenté:

C'est le point le plus visuel du film, la manière dont le cinéastepdvd_017
découpe son cadre, en fragments, mérite que l'on se penche dessus.
Ici, un exemple de cette réalisation particulière.
Kar-Wai réalise un insert incroyable, en situant une main, seule, dans l'immense espace qui l'entoure.
Mais pour combler cet espace immense, le chef opérateur ressert le cadre en donnant une sensation de flou en arrière plan.
Cela renforce le regard sur la main, qui du coup devient l'attrait principal du plan.
Le poing ferme, la main tendue, et cette lumière floue de bout de couloir, sont autant d'indices sur l'incertitude et l'apréhension de Tony Leung.
Sur la photo qui suit, le thème est récurrent, la main est fragile, incertaine, et anxieuse.

Le cinéaste donne le sentiment d'une main vivante, pdvd_0011un personnage à part entière, qui traduit au fur et à mesure qu'avance le film, les sentiments des protagonistes.
Une nouvelle fois, le processus est le même, rendre flou l'arrière plan, pour situer l'image, lui donner de l'importance.
Sur cette phot, et sur la suivante, la main appartient à la même personne, mais le positionnement, ainsi que l'éclairage du gros plan, renvoit à deux impressions différentes.
Sur la photo n°2, elle est mise en lumière par rapport à l'action qu'elle invoque. Elle sort la cigarette de son étui, tandis que l'autre main, tient cet étui.
Sur la dernière photo, la main ne propose aucune action, elle est victime d'une situation. Elle est passive, puisqu'elle simplement posée sur une ballustrade, en ayant la même teinte que celle-çi, d'ailleurs.
L'effet de flou est toujours là, et traduit la mise en scène minimaliste et particulière de son auteur.

Il crée constammentpdvd_0661 de manière très subtile, une sensation de huis
clos, dans la profondeur. Tout se passe toujours, ou presque, au premier plan.
Le reste du cadre est teinté, noir, ou flou, il représente u nespèce de vide pictural, immense, mais dont on ne voit jamais la profondeur.
A l'image, cela rend le film particulier, car on se croirait à l'intérieur, constamment, même lorsque l'action se situe à l'extérieur.
Wong Kar-Wai, offre une dimension spectaculaire de beauté, en utilisant ce procédé stylistique, car son image est épurée, vidée de ses imperfections de second plan, en ne concentrant son action que sur le plan principal du cadre, c'est à dire celui qui est le plus en contact avec le spectateur.
Toujours avec ce soucis du détail, l'oeuvre du réalisateur Hong kongais, peut être considérée comme un gros fragment découpé en plusieurs pièces.

Quand immensité et enfermement ne font qu'un...

Pour renforcer son aspect fragmentaire, en gros plan, WKW pdvd_037
insère, de temps en temps, un plan d'ensemble, qui jongle sur les deux impressions.
Ici, on est loin du gros plan traditionnel, qui ne montre qu'une partie du corps, ou du cadre.
La caméra montre un ensemble, à savoir, un lieu.
Cependant, la sensation ressentie, n'en est pas pour autant différente, même impression, car même thématique et même récurrence en terme de technique utilisée.
Le cadre est noirci dans sa plus grande surface, afin de centrer une nouvelle fois l'action sur le personnage, lui seul, éclairé.
La pendule du dessus, pourrait être le symbole de l'ennui, du quotidien monotone, de l'impatience et de la solitude.
Puis le globe terrestre, objet souvent réutilisé sur bons nombres des plans de ce film. Il traduit l'ouverture sur le monde, et donc l'espace, l'immensité, elle même remise en cause sur le plan, par le paradoxe de son ambiance.

Même sensation, mais cette fois-ci, l'espace est plus définipdvd_0652
tout est éclairé, et l'impression dégagée me semble un tantinet différente. L'image dégage à la fois une sensation de liberté, sur le bord gauche de l'écran, ou l'air s'infiltre dans la pièce, pour se heurter au mur du bord droit, caractérisant lui, l'enfermement.
Puis, l'utilisation aussi de "l'observation", quelqu'un derrière la plante verte, qui regarderait le bout du couloir.
Même le carrelage est séparé par une ligne au milieu, renforcant ainsi cette impression.
C'est la lumière qui marque cette séparation, par son intensité, et son reflet sur le sol.
Un plan tout en symbole, mais à la fois tellement incompréhensible.
Rien y est a observer en terme d'action, à proprement dite, il est un plan de transition, qui renforce un sentiment, ou une ambiance.

Un film, une ambiance, le soucis du détail...

L'histoire nous plonge dans les années 60, ainsi, le travail pdvd_055
effectué sur la retranscription des saveur particulièrement charmantes de cette époque, se doivent d'être fidèles.
Avec la même adresse dans le gros plan, que pour situer l'espace du cadre, WKW, recrée à nouveau un cadre défini, centré sur les objets cette fois-ci.
La machine à écrire n'est pas là par hasard, elle représente à la fois la communication dont ne font pas preuve les protagonistes, et l'objet phare de l'écriture à cette époque là.
Le bureau en bois, typique, sur lequel est placé la machine, est un exemple de plus dans le détail apporté à l'ambiance du film.

La feuille de papier, qui remplace l'écran d'ordinateur, et les classeurs, qui nous font oublier les pochettes en plastique.
Une époque remarquable...

Même sentiment, même description, le vieux téléphone àpdvd_063
cadran, le fil qui pend, pas d'écran digital ou autre. Un clavier basique, en plastique, une coque mondialement connue, et encore fois, un meuble en bois pour le tenir.
Le télephone qui est montré en Insert, mais qui ne sonne jamais dans le film.
Le cinéaste l'utilise juste pour montrer que la communication ne se fait pas dans le film ,amis que pourtant, le matériel existe, et même, prêt à l'emploi.

Sentiment de solitude, évoque ce téléphone, on le croirait triste, inutile, posé là, tel un objet poussiéreux, sans aucune utilité...

Dans le détail, il y' a aussi les habitudes, l'habillement pdvd_028, le
comportement, la classe sociale.

Ils sont issus d'un milieu aisé, ils vont manger au restaurant, un restaurant gastronomique, chic, bourgeois.
La tenue? Un costard, cravate, chemise blanche pour Monsieur Leung, les cheveux plaqués vers l'arrière, la raie bien en place. Les coudes, bien en retrait de la table, les couverts en argents.
Pour madame, une belle robe, une belle montre, et le beau broshing dans les cheveux.
Les bonnes manières, le respect de l'autre, WKW semble revenir en arrière dans l'étude des moeurs également.

Le repas se fait quasi silencieux, on entend le bruits des couverts, qui cognent l'assiette, et la musique, jazz blues, qui se fond dans l'ambiance du restaurant.

Le regard comme refuge de la parole

Dans "In the Mood for Love" les personnages sont amorphespdvd_031
de désir, il ne parlent pas de ce qu'ils ressentent, ils s'observent, se regardent, s'impatientent, peut être aussi.
Ici, la mise en lumière se focalise sur Maggie Cheung, le regard évasif, incertain, frustré.

Elle est déçue par l'amour, et semble refuser celui de Tony Leung. Entre desespoir et mélancolie, elle fuit son quotidien, l'espace d'un instant, pour réflechir, le regard ailleurs, à une autre vie...

Lui, est intrigué, il voudrait la connaitre plus, c'est un gentleman, il respecte les femmes, et reste loin d'elle physiquement, mais l'observe.

L'image est floue, comme la teneur de leurs sentiments...

Le chassé croisé, sans paroles, ou juste un bonjour, chacunpdvd_013
à sa vie, sa direction.
Ils vont à l'opposé l'un de l'autre, pour mieux se rencontrer la fois suivante, car le hasard, semble les rapprocher.
Ils prennent les mêmes rues, les mêmes chemins, mais pas en même temps, et pas dans le même sens.

Mais leurs vies sont différentes, et pourtant les rapproche, l'espace est réduit, comme dans tous ses autres plans, il n'ay pas la place de laisser deux personnes, ils ne peuvent que se croiser, l'espace d'un instant...

Puis ensemble, ils font leur chemin, WKW arrive à son but ultime, la rencontre perpetuelle, le mouvement, le goût de la nouveauté, de l'inconnu, de l'interdit.

L'intimité est à présent au centre de l'action, comme deux pdvd_059
amis, avec de la distance et de la retenue, ils se tiennet l'un et l'autre tout prêt.
Ils se touchent, tête contre tête, ou bras dans les bras, ils ne parlent pas, car les mots ne viennent pas aussi naturellement que les gestes.

Puis, le silence est le remède des belles paroles, pas de blessures, que de la guérison, par le toucher, par ses petits moments de simplicité, et de sincérité.

Le film de WKW est un hymne à l'amour, d'un naturel troublant, avec ce parfum exquis de la première fois, lorsque la timidité remplace la bestialité, la sensualité s'allie à la douceur et la fragilité.

La libération???

Enfin, pour finir là, l'analyse de ce film, je vais montrer deux photos qui prouvent et contredisent la sensation de liberté enfermée des protagonistes.

pdvd_034 Ici, Tony Leung, sous la pluie, la rue semble immense, profonde, et pourtant il est adossé à une grille, qui représente, elle, la fermeture de la liberté.

Il s'abrite, attend quelqu'un, ou quelque chose, qu'il commence à croire impossible.

Il veut fuir, accroché à cette prison quotidienne, et mijote son envie de s'évader.

Il sait....

Il est libéré, l'amour ne l'a pas sauvé, mais lui a donné despdvd_068
ailes.

Il est loin son passé, il recommence une nouvelle vie, ailleurs, là ou il ne connait personne, il prie, se réfugie dans les pierres, pour y marquer de son empreinte, son désir sincère de libération.

Il est libre, il n'est plus enfermé, il est seul, mais peut être le regrette -il....

Seul?......

pdvd_070

Non....nous sommes là, nous, spectateurs, et le cinéaste nous rend enfin hommage. Nous le voyons cet amour, et cet homme seul, nous sommes aussi impliqué...Et nous l'avons vécu son histoire....

Note: 19/20


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Commentaires
U
que dire de plus que ... houaw<br /> <br /> je pensais qu'il n'y avait que mon prof pour faire de telle analyse :|
M
C'est à chaque fois des larmes qui coulent, lorsque je te lis Elminster, toujours beaucoup de franchise et de sincérité. Je ne sais pas quoi rajouter, à part merci...J'essaierais de faire cela chaque mois, voire deux fois par mois, lorsque j'aurais trouvé le rythme lol.<br /> La prochaine, c'est un coup de coeur aussi, fin du mois sur le blog...:)
E
Bon, comme il impossible de rajouter qq chose d'intelligent après ce formidable travail, je me contenterai de me souvenir combien Maggie était belle dans ces robes cintrées traditionnelles, et de souligner combien il est agréable de lire un travail approfondi comme celui-ci. Vicement la suivante !
M
Merci frérot, t'es pas mal non plus quand tu t'y mets lol, à quand la prochaine??<br /> Je te vois pas souvent en ce moment, mais sache que c'est toujours un plaisir de te lire. Chez toi, ou chez nous.<br /> ++ et bonna année à toi aussi
B
Quelle claque!! Superbe analyse, vraiment précise et passionnée.<br /> <br /> Je m'incline!!! lol<br /> <br /> Une très bonne année à toi au fait ;-) @+
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